mardi 6 décembre 2011

C'est pas choli choli


S’il fallait relever toutes les attaques que les ligues de vertu modernes lancent contre la joie de vivre, on n’aurait plus le temps de rien foutre. En tête des ligues, bien sûr, détenteurs jaloux du label « Bien », les écologistes. Les écologistes français, précisons, les meilleurs, les plus performants. Tous les jours ou presque, ces grenouilles de saladier montent au créneau pour lâcher leurs offuscations sur les têtes qui dépassent. On insulte notre candidate ! viennent-ils de glapir, appuyés en paroles par tout ce que la France compte de faux-culs. Jugez-en : Patrick Besson a écrit un article où, phonétiquement, l’accent d'Eva Joly est reproduit. Ça donne des choses comme « Zalut la Vranze ! Auchourt'hui est un krand chour : fous m'afez élue brézidente te la République vranzaise ». Crime de lèse-norvégienne ! Assaut de la beauferie franchouillarde contre l’esprit frappeur d’Oslo! Attaque digne des heures les plus soires de notre histombe ! Racisme ! Xénophobie ! Ecolophobie ! Bobo bashing !Tout y passe, comme dans un conduit menant à la mer…

Quand les Guignols de l’Info foutaient un accent arabe à Arafat et Ben Laden, Noël Mammaire trouvait ça très drôle, mais quand sa championne à lunettes est égratignée dans ce qu’elle a d’ailleurs de moins grotesque (son accent), il crie Goebbels ! Quand deux cents imitateurs singent les tics de Sarkozy, et son phrasé, l’ensemble des écolos de France se gondolent en criant bis ! Mais si l’on ose suggérer qu’Efacholi dit ses conneries avec un accent à se pisser dessus, on convoque immédiatement la Résistance, Valmy et la Levée en masse ! Qué rigolade… Et l’accent de Giscard en son temps, et Barre, et Mitterrand, et Balladur ? J’arrête là…

Mélanchon, qui ne s’abaisserait jamais, lui, à proférer la moindre insulte en public, y est allé de sa défense des « Français nés ailleurs » dont il serait scandaleux de moquer l’accent, ni rien d’autre du reste. Il a vu ça où ? Où a-t-il pris qu’en France, on ne se moque pas des accents ? On ne fait QUE ça, à longueur de journées ! Pagnol en est plein ! L’accent, c’est le truc que Dieu a inventé pour rabattre le caquet du prétentieux qui se croit partout chez lui ! Macache : on voit tout de suite que tu viens de nulle part, norvégien ! On voit que t’es pas de chez nous, oh couillon ! C’est ça, le peuple ! C’est pas un ramassis de curés à la Mélanche qui pondèrent leurs expressions en fonction d’un code distingué, hé nouille ! Le peuple, qui s’y connaît en cons, il te fourre ton accent de merde sous le pif dès que t’a la prétention de lui pomper l’air, et il a raison ! Et il vote pas pour toi, en plus !
J’invite toutes les têtes de nœud à revoir cette admirable scène populaire, dans Gran Torino, où le vieux Kowalski / Eastwood amène son petit protégé chinetoque chez un coiffeur rital de ses amis. Le polac et le macaroni commencent à s’insulter en se traitant de bouffeur de saloperies et d’escroqueur d’aveugles. Et le Jaune devra apprendre comment se servir de la vanne raciale et à quoi elle sert : à t’intégrer dans un groupe où ton petit moi prétentiard aura d’abord été soumis à un test. Si t’es trop con, ou si t’es Mélanchon, t’as aucune chance !


Venant des écologistes, d’ailleurs, cette façon de refuser de voir clairement ce qui est limpide n’étonne pas beaucoup. Dès qu’il s’agit de leurs propres tabous, eux qui se vantent tant de leur courage politique sont toujours les derniers à voir ce que tout le monde constate. Ainsi, pour un écolo français, la criminalité, c’est uniquement le fait des cols blancs et des traders. La violence, c’est celle des flics et de Monsanto, la pollution, c’est le nucléaire. En quoi ils sont aussi partiaux et symétriquement lamentables qu'un militant UMP de base...
Puisqu'il faut donc leur ouvrir les yeux, que ce soit bien clair : dans un discours d’Efacholi, la chose la plus remarquable, c’est son accent ! Le seul truc qui mérite d’être retenu, qui fasse la différence d’avec le néant, c’est son accent ! Sans accent, cette femme passerait TOTALEMENT inaperçue. Car, dans une élection présidentielle, il ne suffit plus de dire n’importe quoi pour se distinguer : c’est devenu la règle générale. C’est ce que les sociologues sérieux appellent « le précédent Chirac ». Depuis lui, révélateur et pour ainsi dire accomplisseur de la modernité politique, il n’est plus possible d’échapper au n’importe quoi pour séduire le blaireau. Ainsi, les efforts d’Efacholi pour dire n’importe quoi sur à peu près tout, ne seraient que perte de temps si elle n’avait cet accent, seul caractère qui permette encore de la remarquer un peu.

Mais, bien sûr, j’allais oublier, il y a aussi ses lunettes. Probablement conseillée par le seul mec lucide de son camp, Efacholi a opté pour des lunettes ridicules, sortes d’œufs au plat portés à incandescence, puis appliqués directement sur le faciès. Ou, peut-être, aire d’atterrissage pour tomates, manière d’égayer les meetings. Assurément, leurres stratégiques derrière lesquels elle est censée disparaître complètement. Dans le secret de sa conscience, le conseiller en image (moouarf) a dû faire ce raisonnement à la hussarde : dès qu’elle va paraître, les journalistes et adversaires vont avoir tellement de bâtons pour la battre, qu’on va détourner leur fiel en leur agitant un joujou rouge sous le nez : pas bête ! Hélas, bien que conçues pour la gaudriole, ces lunettes se sont révélées beaucoup moins comiques que les idées et discours de la protégeuse de gazons. Aujourd’hui, c’est un drame, personne n’y fait même plus attention !

Les socialistes l’avaient bien compris : les écolos sont ingrats. Avec la candidate qu’ils ont, ils devraient remercier Besson de s’intéresser encore à elle. Au lieu de ça, ils l’attaquent, fidèles à leur sens stratégique si particulier. Soyez prudents, intégristes verts, si vous dissuadez trop les moqueurs, bientôt plus personne ne parlera de vous. Rendez-vous à la prochaine élection…