samedi 3 mars 2012

Pas de Pride pour Poutine.

Tout le monde l’a certainement remarqué, la presse française, surtout la presse la plus libérale (c'est-à-dire TOUTE la presse), fait depuis quelque temps une campagne de propagande contre Vladimir Poutine et le système qu’il représente. Rien de bien nouveau, sauf un phénomène qu’il faudra analyser un jour : la propagande ne se donne même plus la peine d’être habile.
Par exemple, les manifestations anti-Poutine nous sont présentées comme massives alors que rapportées au nombre d’habitants, elles témoignent de l’inverse. On nous dit qu’une importante manifestation contre la « triche » des dernières législatives a rassemblé à Moscou entre 11 et 30 000 manifestants, complaisamment présentés comme sympathiques et populaires. Formidable ! Mais voilà, Moscou compte dix millions d’habitants. Sans compter la banlieue. Dans la réalité, les manifestants ont du se sentir bien seuls… Pour comparaison, en 2010, les très petites manifs contre la réforme des retraites en France avaient quand même rassemblé, à Lyon (dix fois moins peuplée que Moscou), deux fois plus de monde… Mais qu’importe : si c’est l’Express, Libé ou le Figaro qui le disent, c’est que c’est vrai !

On se souvient avec émotion du scandale qu’a représenté jadis, dans la même presse libre, l’emprisonnement du milliardaire Khodorkovski. Un pays où un milliardaire va en prison, vous n’y pensez pas ! Et la prison pour quoi, je vous le demande ? Fraude fiscale. Peuh ! Trois fois rien. En France, pays civilisé, on n’emprisonne plus un milliardaire pour ça : il suffit qu’il s’excuse.
A l’heure d’Internet, que la presse établie présente volontiers comme le creuset des plus infâmes rumeurs, il est assez logique que les propagandes de presse se simplifient : pourquoi se casser le tronc à imaginer des montages complexes quand on sait que toute information, même fantaisiste, sera relayée par une Toile de millions d’abrutis ? La presse lance ses scuds, Internet reprend et discutaille sur la base de ses éléments, et l’éventuel honnête homme qui veut comprendre se trouve noyé dans le brouillard, ce qui, avouons-le, est un mode de noyade bien nouveau. L’effet recherché est garanti : il ne s’agit pas de faire croire à quelque chose de solidement construit, mais de semer les graines du trouble, de rendre confuse une situation qui l’est de toute façon déjà, et de décourager l’esprit critique, du moins les quelques rogatons de ce qu’il fut.

Sur l’exemple de Khodorkovski, nous sommes dans un cas typique de double pesée. Deux poids, deux mesures. Quand un milliardaire français est emprisonné pour fraude, comme Bernard Tapie en son temps, c’est justice. Quand ça se passe en Russie, c’est un crime contre les Droits de l’Homme et du Milliardaire. Dans le monde Bien, Madoff et Wisley Snipes peuvent aller en taule. Chez les Méchants, Khodorkovski est un martyr sur qui on fait des films, un homme dont le destin est « lié au sort démocratique de la Russie », rien de moins ! Ha, la presse libérale…

Le dernier exemple, plus drôle encore, est donné par cette campagne pour enfants que le Figaro et Libé, mains dans la main, lancent ces derniers jours. Il s’agit de montrer que Poutine est un gros con, c'est-à-dire un homme viril, et qui le montre. Depuis des décennies, il est en effet établi qu’en dehors de Yannick Noah, seuls les très gros cons prennent la liberté d’exhiber leur virilité. On ne peut utiliser cette vieille valeur que dans le cas où l’on vend des slips, des crèmes à raser, des bagnoles ou des assurances pour la famille. Si c’est pour faire du fric, c’est bien.
C’est normal.
C’est moral.
OK.
C’est pour la bonne cause.
Mais en tant que dirigeant politique, surtout Poutine, potentat autocratique repoussant, il est interdit de se montrer séduisant, séducteur, bien conservé, fonceur, actif, athlétique. Plus grave encore que l’interdiction prononcée par Libé et le Fig, avoir une image virile serait ridicule. Et en ces temps de médiacratie, être ridicule équivaut à peu près à la fosse commune. Poutine le sportif est ri-di-cule ! Hououou !


La propagande ne va pas plus loin, elle ne s’embarrasse pas de théorie complexe, elle n’imagine pas de procédé plus sophistiqué que ça, elle ne pisse finalement pas plus haut : il lui suffit de montrer quelques images du dictateur en cavalier, en pilote d’avion ou en judoka pour que des millions d’idiots oublient les photos d’Obama et de Sarkozy, que je livre donc en conclusion.