mercredi 28 octobre 2015

Morano de race blanche



Il y a quelques années, la France a subi un choc émotionnel grave nécessitant le recours à des cellules de soutien psychologique obligatoires pour tous les citoyens. A l’époque, un certain Jean-Pierre Chevènement, ministre, avait réagi à l’assassinat d’un jeune garçon par deux autres (le motif : un regard, une clope, un cheveu mal placé) en traitant ces derniers de « sauvageons ». Ses collègues ministres, dont l’abasourdissante Voynet, avaient aussitôt glapi de conserve contre ce glissement raciste inacceptable (une explication est ici nécessaire : pour ces obsédés, sauvageon rappelait « sauvage », ce qui rappelle « nègre », « bamboula » et autres « mal-blanchi » : horreur ! En fait, sauvageons désigne un arbre non-greffé et donc, par analogie, un sale con non éduqué, et rien d’autre). Pendant quelques semaines, la France s’émut, la France souffrit, la France se rappela les heures les plus soires de son histombre. Après une carrière politique peu suspecte de turpitude morale, Chevènement était devenu, par l’effet d’un mot, un crypto-nazi de première bourre, faisant sortir du fourré le troupeau des antinazis, troupeau en forme de meute de toute première qualité lui aussi. Devenu débordant, excédentaire et, pour tout dire, hypertrophié, l’antinazisme franchouillard est, depuis cet âge d’or, la principale production indigène du pays, sa plus grande fierté à l’exportation; bientôt, on ne produira plus que ça. Que n’a-t-on commencé la production en 1940 !
La mort de l’adolescent très vite oubliée (que pesait-elle face à l’ignoblitude verbale de la bétimonde ?), la France concentra ses forces sur sa mission principale, sur la dernière passion qui lui reste : la dénonce.

mercredi 7 octobre 2015

Choses vues : au feu rouge



J’arrive ce matin devant le nouveau musée des Confluences, un truc immense, informe, technique, lourd et hors de prix, que les édiles ont bâti dans l’espoir de renouveler à Lyon, qui n’en a pas besoin, le coup de Bilbao. Au feu rouge, tandis que cinquante bagnoles poireautent dans l’espoir du vert, une nana fait la manche. Elle n’a pas d’âge, des cheveux en bataille, elle est vêtue chaudement, c’est-à-dire qu’elle ressemble à une sorte de gros sac. Elle tient devant sa poitrine un écriteau de belle dimension détaillant sa déchéance : sans abri, sans revenu, j’ai faim, une pièce SVP ou un ticket restaurant. Mais, pour obéir aux lois du marketing que nous ignorons tous sans les ignorer vraiment, elle sourit. Elle balance autour d’elle, à destination des pauvres cons coincés dans leur habitacle surchauffé où les publicités de RTL leur bombardent, directement dans les tripes, leurs harangues insanes au son compressé, des œillades ravies, des grandes démonstrations de gencives, des sourires à la Sophia Loren (en beaucoup moins sexy) et des saluts de la main à la façon de la reine d’Angleterre quand elle inaugure un truc inutile (bateau de guerre, collège, institut pour la paix et l’amitié entre les hordes).